REPÈRES
LE NÉO-CLASSIQUE AUGMENTÉ
Néo-classique ?
La musique instrumentale repose sur l'agilité, tant physique que mentale. Elle vise la transparence expressive de l'émotion ... Comprenez... il s'agit que le geste de l'interprète soit - en quelque sorte - directement relié aux émotions que lui inspire l'oeuvre. C'est la virtuosité du "faire" qui, dans son sens originel, désignait la capacité de l'artiste virtuose à mettre l'âme des auditeurs en mouvement... mouvement intérieur, apparemment immobile. Avec l'évolution du temps, la virtuosité s'extériorisera et l'instrumentiste se transformera parfois en hystrion (Mozart, Paganini, Lizst, etc.) dans une recherche de performance plus sportive que musicale.
Le néo-classicisme évoqué ici fait référence à cette façon ancestrale, presque primitive au sens "premier" du terme, de faire de la musique avec des instruments classiques : piano, violon alto.
Augmenté ?
En 1949, Pierre Schaeffer marque d'une pierre blanche l'histoire de la musique en donnant avec Pierre Henri, le premier concert de musique "concrète". La révolution de l'écoute est en marche.
Non seulement il existe d'autres musiques que celles déterminées par le modèle tonal et tempéré de la musique occidentale, ce que Claude Debussy découvrira lors de l'exposition universelle de Paris en 1895 en écoutant les gamelans balinais, mais Pierre Schaeffer révèle qu'il existe de nombreux sons qui ont des propriétés musicales et qui pourtant échappent au "faire" et donc à l'apprentissage classique des instruments et du solfège.
Ces sons ne sont pas rares. Ils sont mêmes innombrables. Ils se distinguent des sons instrumentaux par la richesse de leur timbre. En les écoutant, une oreille exercée perçoit des micro-structures musicales qui confèrent à chacun d'eux une singularité, une signature, aussi reconnaissable qu'une mélodie ou un motif rythmique.
Pour ouvrir cette nouvelle porte, le compositeur doit développer son sens de l'écoute et donc, en quelque sorte "augmenter" son champ de perception de la musique.
Pour utiliser ces nouveaux objets sonores, il doit "sculpter" dans le matériau sonore afin de leur donner une forme propre à la construction musicale. Rappelons-nous la définition de la musique proposée à la même époque par Igor Stravinsky : "la musique est une architecture sonore".
La musique concrète des pères fondateurs deviendra la musique électroacoustique avec l'avènement de l'électronique et la fusion des techniques d'enregistrement et de composition par ordinateur.
Le néo-classique augmenté ,c'est la tentative de construction d'une musique située au point de rencontre entre une pratique instrumentale néo-classique et cette architecture sonore induite par le choix de matériaux appropriés qui enrichissent et donc en quelque sorte, augmentent le timbre des instruments acoustiques.
SOUND PROFILER
Le temps des pionniers
Aux premiers temps de la musique électroacoustique, les compositeurs étaient polyvalents et exerçaient plusieurs tâches devenues depuis des métiers : chasse de son, enregistrement, transformation, assemblage sous formes de clips (boucles, one shot) ou de racks de pseudo instruments gérés par des surfaces de contrôle (tablettes, claviers à touche, joysticks, webcam, etc.).
Depuis, la professionalisation de la chaîne électroacoustique a débouché sur une offre quasi-illimitée d'objects sonores et de moyens de transformation pour les "musicaliser". En particulier, les instruments de tous lieux et de toutes les époques sont soigneusement enregistrés avec parfois des milliers de variations les plus subtiles d'une seule note.... y compris toutes sortes d'imperfections. Tout ce qui produit (ou produisait) du son sous forme d'instruments est à la portée d'un clic de souris où d'une platine de DJ. Des sociétés spécialisées (Loopmaster, Isotonik, Puremagnetik, etc.) se chargent d'enrichir cette offre préparatoire à la composition musicale du XXIème siècle. C'est la phase du Sound design.

Le Sound profiler
La création purement électroacoustique n'a pour contrainte que ce que le compositeur choisit de s'imposer ce qui constituera d'ailleurs le thème (à tous les sens du mots) de l'oeuvre. Le travail est très différent quand il s'agit d'associer instruments acoustiques et électro. Il s'agit d'harmoniser deux contraintes, deux modèles musicaux a priori disjoints, celui du "faire" de la musique "néo-classique" et celui de "l'écoute" du monde électroacoustique. Pour cela, il faut procéder avec les centaines de milliers d'objets sonores disponibles comme avec autant d'instrumentistes et organiser des auditions... un casting, en quelque sorte;;;et donc définir un ou des profils. Ce travail d'investigation sonore et de traitement, OviD-J l'a baptisé Sound profiling.
Une fois les sons choisis; ils sont traités et assemblés comme un lego sous forme de trames électro tissées avec les trames acoustiques du piano, de l'alto, par exemple.
C'est la phase de composition qui serait plus conventionnelle si elle n'empiétait, désormais, sur le mixage et le mastering des oeuvres. Mais ça, c'est une autre histoire....